Lisbeth Gruwez – Festival d’Avignon 2016

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Nous sommes foutrement loin d’aller bien*

Respirez à fond !

Que ferions-nous sans les artistes ? J’admire profondément leur volonté de nous aider à surmonter nos peurs et reprendre en main notre destin. Lisbeth Gruwez, dans une performance exceptionnelle aux côtés de Nicolas Vladyslav, ausculte les différentes manifestations de la peur pour nous en détacher et penser avec recul.

Lâchons prise et laissons-nous respirer, haleter avec les danseurs. Osons laisser exploser nos peurs pour mieux les regarder ! La peur annihile toute pensée et tout autre sentiment. Le sujet devient brûlant d’actualités. Les attentats plongent nombre d’entre nous dans un état de panique, duquel rien de bon ne peut sortir. Lisbeth n’en parle pas mais cette actualité est bien présente lors de ce festival d’Avignon 2016. Et par bonheur, les artistes s’en sont emparés. Comme le disait bien Sidi Larbi Cherkaoui hier dans le point presse, le théâtre est un rituel qui nous conduit à prendre le temps ensemble et à réfléchir calmement.

Une chorégraphie des états extrêmes

En voulant décrire un corps en état d’extase, Lisbeth Gruwez a réalisé que cette pièce formait une trilogie avec les ses deux précédentes, l’une sur le discours (It’s going to get worse and worse, my friend), l’autre sur le fou-rire (AH/HA), qui seront de nouveaux programmées en région parisienne en 2017-2018.

Cette nouvelle pièce We’re pretty fuckin’ far from okay, est construite avec soin :

– les deux danseurs sont isolés, plaqués sur leur chaise, qui évoque le cadre qui emprisonne

– les deux danseurs se cherchent et se trouvent, collés l’un à l’autre, ils se soutiennent mais se retiennent

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– les deux corps se séparent, le malaise monte à l’extrême, le geste de gêne devient un frottement frénétique.

La galaxie belge

Quand je vois danser  Nicolas Vladislav, je pense aux pièces  des débuts de Sidi Larbi Cherkaoui et Damien Jalet. J’apprends le lendemain, qu’il dansait dans Foi il y’a 10 ans !

Quand je vois danser Lisbeth Gruwez, je pense à Fase et à Rosas dans Rosas de Anne Teresa de Keersmaeker. Je découvre qu’elle a été formé à son école, P.A.R.T.S.. Cette pièce n’est pas du ATK mais l’héritage est visible. Comment ne pas aimer ? Elle a dansé pour Jan Fabre.

En point presse ce matin, je découvre que Lisbeth dansait également dans Foi de Sidi Larbi Cherkaoui et Damien Jalet, en duo avec Nicolas Vladyslav. Ils se retrouvent 10 après et leurs « cellules se reconnaissent » selon les dires de Lisbeth.

La Belgique continue de nous alimenter d’artistes et d’oeuvres incroyables. Avignon est un festival de talents belges, que je découvre avec joie en théâtre et danse. Petit pays par la taille, immense par les artistes qu’elle accueille.

Catherine Zavodska

*Traduction en français du titre de la pièce de Lisbeth Gruwez, création pour le festival d’Avignon 2016 : We’re pretty fuckin’far from okay (du 18 au 24 juillet 2016, 18h30, durée 1h)

Image à la Une © Christophe Raynaud de Lage

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